samedi 25 juillet 2015

Top 5 Documentaires Juillet

Les animaux en danger
G. Bologna
Triathlon
S. Cascua
Méthode Feil
V. de Klerk-Rubin
Créer ses fleurs en papier
D. Brown
Vivre sans pétrole
B. Bertrand

vendredi 17 juillet 2015

Top 5 Romans Juillet 2015

A. Goetz
La nouvelle vie d'A. Lupin
D. O'Brien
Wild Idea
A.M. Homes
Puissions-nous
être pardonnés
W. Giraldi
Aucun homme
ni dieu
S. Delijani
Les Jacarandas de
Téhéran

Les grandes (et petites) amoureuses de la littérature # 5 le roman où la pureté n’est plus exaltée

L’image de la femme amoureuse écrasée par la société et les mœurs de son époque est dépassée. Les femmes malheureuses, ravagées ou résignées par amour deviennent plus rares dans la littérature. L’écrivain crée, pour garder ce modèle, de nouveaux obstacles, plus terrifiants et destructeurs.
Ainsi comment peut-on lutter contre une rivale morte ? « J’aurais pu lutter contre une vivante, non contre une morte. S’il y avait une femme à Londres que Maxime aimât, quelqu’un à qui il écrivît, rendît visite, avec qui il dinât, avec qui il couchât, j’aurais pu lutter. Le terrain serait égal entre elle et moi. Je n’aurai pas peur » (Rebecca de Daphne Du Maurier).


Rebecca, A. Hitchcock, 1940

Stefan Zweig dans sa nouvelle Vingt-quatre heures de la vie d’une femme raconte la pulsion amoureuse que Mrs C. ressent pour un flambeur, un joueur compulsif rencontré dans un casino. Une journée où le désir incontrôlable conduit cette veuve respectable à vouloir combattre une addiction suicidaire. Bien des années plus tard, devenue une vieille dame respectable, elle avoue son péché.

Autre obstacle impitoyable : la disparition de l’être aimé dans l’horreur de la guerre durant les deux conflits mondiaux.
« Mathilde cherche Manech » son amour de toujours qui a été condamné à mort et exécuté pour avoir refusé de combattre. Elle ne veut pas croire à la mort de celui qu’elle aime. Nous sommes en 1917 dans Un long dimanche de fiançailles de Sébastien Japrisot.


Bande-annonce de Un long dimanche de fiançailles, de J.P. Jeunet


C’est en 1945 que Véra, 16 ans, voit disparaître son amoureux. Elle ne peut qu’attendre son retour. « Une femme si intensément destinée au bonheur et qui choisit, on dirait avec insouciance, la solitude, la fidélité envers un absent… » (Andreï Makine, La femme qui attendait.)



Mais au 20ème siècle, une autre profil d’amoureuse se met en place et perdure encore actuellement.

L’écrivain autorise d’abord la femme amoureuse à aimer sans tabous. Le désir est reconnu et déclaré. La séduction est autorisée, l’acte physique mentionné, puis décrit.
Dès le début du siècle, Colette aborde dans sa série Claudine la passion amoureuse entre femmes.
David Herbert Lawrence dans L’amant de Lady Chatterley décrit le périple amoureux de Constance, jeune femme mariée, à un homme paralysé et impuissant. Pour sortir d’une vie monotone, elle entame une liaison avec un garde-chasse. Mais à la différence des héroïnes des siècles précédents, elle n’est pas punie. Elle obtient même la séparation et le divorce.



Des textes scandaleux lors de leur publication, devenus des « classiques » de la littérature.

Qu’en sera-t-il de la série  Fifty shades : cinquante nuances de Grey  de E L James ? Seule certitude : l’acte sexuel ne se cache plus et devient même vecteur principal d’un succès éditorial.

Enfin, une nouvelle forme du récit est établie. La passion amoureuse au féminin n’est plus décrite comme une aventure féminine. Elle perd de sa violence, de sa force. Les mêmes éléments du récit peuvent perdurer, mais tous les excès sont bannis : un peu de jalousie, un peu de violence, quelques pleurs, aucun suicide, un peu de sentiments, du sexe….
Les codes du roman d’amour changent avec la naissance du roman sentimental populaire, aussi nommé de façon péjorative  « roman rose » ou «  à l’eau de rose » et  de nos jours « littérature de poulette » (chick lit).
Dans ce nouveau type de roman, la femme amoureuse est le personnage principal. Le texte est construit autour d’une héroïne souvent urbaine, active, « à la recherche du grand amour », comprendre l’amour éternel et unique. Le processus amoureux va de la découverte de l’amour et à son dénouement heureux avec quelques scènes d’amour idéalisés ou érotiques.
C’est le triomphe d’une passion amoureuse féminine volontairement banalisée.

Ces amoureuses se sont multipliées au 20ème et 21ème siècle, car « elles se vendent bien ». L’édition de ces romans sentimentaux est même devenue une gigantesque entreprise commerciale qui rapporte des milliards à travers le monde.
Mais faut-il vraiment se questionner sur l’intérêt du  roman sentimental populaire? Il donne à lire à ses millions de lecteurs -plutôt des lectrices- une passion amoureuse certes très morale, mais heureuse. C’est une littérature des bons sentiments, qui permet aussi de s’évader d’un quotidien morose, de se faire du bien.

Petits romans, collections spécialisées, séries standardisées…Parmi les auteurs les plus lus :

Barbara Cartland. Auteur plus de 400 romans d’amour, publiés dès 1923. Un titre parmi d'autres: Le roi et elle.
Anne Golon et sa célèbre série Angélique, adaptée pour le cinéma.
Cécile Saint-Laurent, pseudonyme choisi par l’académicien Jacques Laurent pour publier sa série Caroline Chérie
Nora Roberts, Un cœur naufragé
Danielle Steel,Traversées
Barbara Taylor Bradford, La splendeur de Cavendon Hall
Candace BushnellLe journal de Carrie, l'héroïne de la série Sex and the city






Et bien d’autres encore… Mais je n’irai pas plus loin.

Dans les années à venir, de nouvelles «  grandes amoureuses » vont-elles nous être dévoilées ? Une chose est certaine : l’empathie entre l’amoureuse de fiction et ses lecteurs va continuer à fonctionner.

Isabelle

vendredi 10 juillet 2015

Les grandes (et petites) amoureuses de la littérature # 4 "L'unique et ses sœurs", les amoureuses universelles

La passion amoureuse, avec ses différentes étapes et ses différents degrés d’intensité (de la faiblesse amoureuse à la violente passion) est un thème courant dans la fiction romanesque.
Mais seulement quelques très rares amoureuses arrivent à nous faire tout oublier (l’intrigue, l’homme objet de passion, les autres protagonistes, le contexte historique et social…) et à devenir universelles.

Des femmes aimantes, exceptionnelles, uniques et qui fascinent éternellement...Madame de Lafayette crée Mademoiselle de Chartres évoluant au milieu d’intrigues de cour du 16ème siècle. Elle est belle, intelligente, instruite et déjà « objet » d’un mariage arrangé (avec le prince de Clèves). Pour son époux qui l’aime (ce qui est très rare à cette époque de mariages arrangés) elle ne ressent que de l’amitié. Elle découvre les tourments de l’amour avec le duc de Nemours et apprend à les dissimuler. A la mort du prince, enfin libre, elle se refuse au duc, par clairvoyance (« je ne ferai plus votre bonheur »). Elle ne veut rien subir, elle ne veut pas de dénouement tragique à sa merveilleuse histoire. Pour Madame de Lafayette, l’amour ne peut être qu’unique et permanent. L’amour est sacralisé.

Alexandre Dumas fils met en scène l’abnégation amoureuse. Marguerite Gautier, La dame aux camélias est éprise d’Armand Duval. Mais pour le préserver du déshonneur, dû à une mésalliance, elle rompt avec lui et préfère s’enfuir. L’agonie de Marguerite est solitaire et très longue. La passion amoureuse aboutit au sacrifice ultime, mais volontaire.
Giuseppe Verdi s’inspire de ce personnage devenu mythique et fait mourir directement sur scène Marguerite devenue Violetta.

«  Je veux te révéler toute ma vie, cette vie qui véritablement n’a commencé que le jour où je t’ai connu », ainsi débute une ultime une confession, « une confidence crépusculaire ». En utilisant la nouvelle épistolaire, dans Lettre d’une inconnue  Stefan Zweig dévoile l’étrange processus de la passion amoureuse gardée secrète à jamais, par peur de la dévoyer.

Emma Bovary, créature pathétique, a un destin déplorable. Gustave Flaubert fait découvrir à Emma la passion amoureuse par la lecture et les fantasmes. Elle cherche un bonheur inaccessible et finit par se trouver un bien pâle amant. Abandonnée par lui, elle recherche toujours le bonheur ultime et replonge dans une deuxième aventure sans issue : « elle n’était pas heureuse, ne l’avait jamais été ».Son suicide est son dernier échec. Il n’est pas question de renoncement volontaire, mais d’une longue déchéance.




Anna Karénine vit une passion coupable. Léon Tolstoï décrit le coup de foudre violent, la liaison fougueuse, ignorante des convenances. La jeune femme par amour du comte Vronski, abandonne mari et enfants. Mais elle ne peut assumer jusqu’au bout cet amour interdit. Amoureuse, jalouse, déchirée, Anna est magnifique, toujours frémissante, palpitante. Le processus de l’amour incontrôlable est lentement décortiqué jusqu’à sa fin ultime dans la mort.




La fulgurante Scarlett O’Hara vit un amour romantique soumis à une multitude d’épreuves. Margaret Mitchell crée une jeune femme à la beauté insouciante qui affole tous les hommes, mais qui n'en aime qu’un seul ou du moins le croit-elle. La passion amoureuse est le fil conducteur de cette immense fresque. La guerre civile, la faim, la mort, le chagrin ne détruisent pas l’amour inaccessible. Ce n’est qu’à la fin du roman que la jeune femme découvre que cet amour pour lequel elle s’est tant battue, n’est qu’une chimère et que son véritable amour est l’homme qu’elle a tant détesté. Le sentiment amoureux peut être éternel, mais avec Autant en emporte le vent, nous découvrons qu’il peut être aussi un leurre.


Une française de 15 ans et un chinois de 12 ans son aîné. Marguerite Duras, avec L’Amant crée une nouvelle amoureuse, volontairement opposée aux conventions, refusant le dictat de la classe sociale, mais surtout celui lié à la race. Elle vit une histoire d’amour interraciale, indestructible, même si l’histoire d’amour s’interrompt par un retour en France. Bien des années plus tard, le souvenir de cette passion est toujours aussi vif chez les deux amants. Car leur amour est tout autant sentimental que physique. De la découverte de l’acte physique aux joies de la chair partagées, l’amour ne se dissimule plus.

L'amant, de J.J. Annaud, 1992

La semaine prochaine : Au 20ème siècle, La femme se libère, l’amoureuse aussi.

Isabelle


vendredi 3 juillet 2015

Les grandes (et petites) amoureuses de la littérature # 3 Au théâtre, la révélation de l'acte d'aimer au féminin




Il existe de nombreuses « amoureuses de théâtre ». Au théâtre l’amante peut tenir le devant de la scène ou n’être qu’un second rôle. Dans le registre de la comédie, elle est l’ingénue, la volage, peut-être l’objet de convoitise d’hommes cupides ou parfois réellement amoureux. Elle peut aussi aimer et l’exprimer sans détour. Molière a rendu inoubliable des femmes amoureuses. Ainsi Agnès dans L’Ecole des femmes de Molière.




La tragédie met en scène le désespoir amoureux  et décrit des amoureuses meurtries. Elle autorise les cris, les pleurs et dévoile des âmes ravagées ou montre la vengeance dévastatrice.
Parmi ces amantes ardentes et idéalisées, Juliette dans Roméo et Juliette de William Shakespeare. La mort des deux amants est nécessaire à la réconciliation de leurs familles ennemies.

Au 17ème siècle, les femmes amoureuses dans la tragédie se nomment Phèdre, Médée, Andromaque ou Camille. Elles étaient déjà décrites dans les récits mythiques. Bien des siècles plus tard, elles se manifestent à nouveau et pleinement, en occupant le devant de la scène, même  si elles savent que  le combat est perdu d’avance.
Corneille créé une Médée  rugissante devenue meurtrière par vengeance, tuant ses propres enfants !

 Médée et Jason, Carle Van Loo, 1759
Camille, dans la pièce Horace, ne voit dans le triomphe de son frère que la perte de son amour. Elle tombe dans une affreuse douleur, éclate en cris d’indignation contre son frère Horace et même la toute puissante Rome !

"Rome, l’unique objet de mon ressentiment !
Rome, à qui vient ton bras d’immoler mon Amant !
Rome, qui t’a vu naître et que ton  cœur adore !
Rome, enfin que je hais parce qu’elle t’honore !
(…)
Puissé-je de mes yeux y voir tomber ce foudre,
Voir ses maisons en cendre, et tes lauriers en poudre :
Voir le dernier Romain à son dernier soupir,
Moi seule en être la cause, et mourir de plaisir."

[Acte IV, scène V]


Pierre Corneille imprécations de Camille

Racine reprend, lui, le personnage de Phèdre (à la suite d’Euripide et de Sénèque) amoureuse de son beau-fils Hyppolite, qui refuse son amour.


« Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un  trouble s'éleva dans mon âme éperdue;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps et transir et brûler :
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables :
D'un sang qu'elle poursuit tourments inévitables !
Par des vœux assidus je crus les détourner :
Je lui bâtis un temple et pris soin de l'orner ;
(…)
J'adorais Hippolyte : et, le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer,
J'offrais tout à ce dieu que je n'osais nommer.
Je l'évitais partout. O comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père."

 [Acte I scène III]


Des tirades universellement reprises... Dés le lycée…


La prochaine chronique :  « l’Unique et ses sœurs » : L'amoureuse doit-elle forcement être malheureuse ?

Isabelle