vendredi 20 mars 2015

Amélie Nothomb ou la fête des prénoms


Qui osera affubler son enfant de prénoms tels que  « Plutarque », « Pétronille », ou encore « Astrobale », ou « Zoïle » ?

Si vous n’avez pas encore deviné, plongez-vous dans les divers romans d’Amélie Nothomb.
La plus française des romancières belges contemporaines fait le choix et l’étude des prénoms de ses héros, avant l’écriture de tout  roman. Ils correspondent au plus près aux personnages et à leur psychologie. Ce ne sont jamais des prénoms inventés, tout est étudié. Ce qui intéresse Amélie Nothomb, c’est de donner un beau prénom à ses personnages.

Dans un échange épistolaire avec Amélie Nothomb, elle m’indique trouver les prénoms pour ses héros, en grande partie dans L’Encyclopédie Larousse du XIX° siècle.


Lettre manuscrite d'Amélie Nothomb




Petit panorama des prénoms utilisés dans les divers romans d’Amélie Nothomb : Hazel, Léopoldine, Plectrude, Zdema, Astrobale, Pretextat, Textor, Epiphane, Zoïle, Olaf, Palaméde, et bien d’autres encore…

  • Prétextat Tach, écrivain obèse, cynique, misanthrope, Prix Nobel de Littérature, atteint d’un cancer, vit reclus dans son appartement depuis des années  et refuse tout interview à la presse, dans Hygiène de l’assassin.

  • Epiphane Otos, très laid,  a tout pour déplaire et déteste le monde autant que le monde le déteste. Il devient mannequin- repoussoir des top-models les plus en vogue, pour et grâce à Ethel. Sa laideur le condamne à n’être que le confident (l’oreille) de celle qu’il aime,  dans Attentat.

  • Textor Textel, raseur professionnel face à Jérôme Angust, homme d’affaires exaspéré par le retard de son avion, dans Cosmétique de l’ennemi.

  • Plectrude, orpheline surdouée de 10 ans, dans Robert des Noms propres.

  • Christa, rencontre Blanche, et devient une tortionnaire pour cette jeune fille solitaire et introvertie, dans Antéchrista.

  • Zdena, kapo dans le jeu télévisé « Concentration », face à des candidats tel que CKZ 114 (ou Pannonique), ou EPJ 327, ou MDA 802 ou Simon de Cyrène. Pannonique renvoie à la Pannonie (nom que les Romains donnaient à la Hongrie) pays le plus ravagé par la Shoah, thème d’Acide Sulfurique.

  • Hirondelle, belle jeune fille tueuse dans  Journal d’hirondelle.

  • Olaf Sildur, nationalité suédoise, brun et grassouillet, grand amateur de champagne (comme Amélie Nothomb) qui meurt subitement, dans l’appartement du héros Baptiste Bordave, dans Le fait du prince.

  • Saturnine Puissant, 25 ans, belge comme l’auteur, devient colocataire dans un hôtel de maître du VII° arrondissement de Paris, chez Don Elemirio Nibal y Milcar,  adepte de grands crus de champagne, dans Barbe bleue. Les différentes défuntes (cryogénisées) sont : Parvati, Amaterasu, Lilith, Erzébeth Bathory (apicultrice intergalactique), Emeline, Proserpine, Marie-Madeleine. L’excellent secrétaire de Don Elemirio se nomme Hilarion Gravelan.

  • Palamède Bernardin, voisin envahissant de Emile et Juliette dans leur thébaïde au fond des bois, où ils comptaient finir leurs jours, tranquilles, l’un près de l’autre, dans Les Catilinaires

  • Pétronille Fanto, devient le double maléfique d’une romancière belge de 30 ans, et l’entraîne dans des beuveries sans fin, dans Pétronille.

  • Même pour le dernier livre audio Pétronille, le texte est lu par Pulcherie Gadmer

Pour choisir le prénom de votre futur enfant, vous pouvez aussi rester plus classique et vous servir du calendrier des Postes, ou de la cote des prénoms.


Et pour vous distraire, vous pouvez lire aussi :

  • Le prénom, de Matthieu Delaporte et Alexandre de la Patellière.
Ou regarder le film
  • Le prénom, réalisé par Matthieu Delaporte et Alexandre de la Patellière.




Fabienne Claire Nothomb nait en 1966, au sein d’une famille noble belge, dont les centres d’intérêts sont la politique et la littérature. Son père, diplomate belge, fait voyager la famille, au fil de ses affectations dans différents pays (Chine, Etats-Unis, Bangladesh, Birmanie…) et deux périodes au Japon (1968-1972 ; puis 1988-1997). La vie diplomatique de son père, et donc de sa propre enfance, sera un sujet d’inspiration pour Amélie, notamment dans son roman  Biographie de la Faim.

En 1992, elle débute une carrière d’écrivain, et choisit comme nom de plume Amélie Nothomb.

Elle se crée alors, une biographie avec des éléments fictifs comme réels (article du Post en 2009 sur l’affaire Nothomb), déclare être née à Kobé en 1967, vit comme un exil son départ du Japon « Pays de la beauté » vers la Chine « Pays de la laideur ». Amélie Nothomb devient « La Machine Nothomb » (Pascal Goffaux, journaliste de la RTBF), et avec sa maison d’édition contrôle entièrement sa communication.
Elle se met en scène plusieurs fois dans ses romans dont l’action se joue au Japon. (Stupeur et tremblements, Ni d’Eve ni d’Adam).

Amélie Nothomb publie de façon très régulière un livre chaque année, aux éditions Albin Michel. Ses livres sont traduits dans 37 langues. Elle dit d’elle-même « être enceinte de ses romans », et déclare écrire depuis l’âge de ses 17 ans.




Vêtue entièrement de noir, grand chapeau, rouge à lèvres très marqué, son look est créé, et son excentricité n’est plus à prouver. Tous les ans, Amélie Nothomb suscite l’enthousiasme ou les critiques, ne laisse pas indifférent, et son succès en librairie n’est plus à démontrer.
Elle déclare prendre le temps de répondre à toutes les lettres reçues de ses lecteurs (effectivement, elle a répondu à tous mes courriers….), boire des litres de thé dès 5 heures du matin où elle commence à travailler dans un petit bureau capharnaüm chez son éditeur. Elle ne possède pas d’ordinateur, écrit sur ses genoux, assise sur une chaise, dans des cahiers d’écolier avec un stylo bille. Le soir, elle abandonne le thé et devient accro au Champagne (grands crus).

Plusieurs de ses romans ont été adaptés au théâtre, elle est aussi parolière pour des amies.

Trois romans phares ont été adaptés au cinéma :

1999 : Hygiène de l’assassin
2003 : Stupeur et tremblements
Et en 2015 : Ni d’Eve ni d’Adam, devient « Tokyo fiancée »

Distinctions :

1999 : Grand prix du roman de l’Académie Française
2007 : Prix de Flore
2008 : Grand-prix Jean Giono


Dernière minute : En mars 2015, la romancière belge, auteur de 23 romans publiés, a été élue membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, prenant le siège de Simon Leys (1935-2014).



Coquillette